Question d’actualité relative à la Compagnie parisienne de chauffage urbain (C.P.C.U.).
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Le 7 janvier 2020, le tribunal administratif de Paris a déclaré illégale la grille tarifaire de la Compagnie parisienne de chauffage urbain plus connue sous le nom de C.P.C.U., dont le groupe écologiste pointait l’absence de suivi et de contrôle par le Conseil de Paris depuis 2016. Or, en décembre 2018, le Conseil d’administration de la C.P.C.U. a voté une augmentation de ses tarifs sans que cela soit validé par le Conseil de Paris. L’augmentation devait atteindre 8 % et se faire en deux temps : 3 % en septembre 2020 et plus 5 % en mars 2021.

En février 2016, au Conseil de Paris, le groupe écologiste rappelait que la C.P.C.U. bénéficie d’une délégation de service public et n’est donc pas totalement libre de fixer ses tarifs de vente. Nous demandions que la hausse prévue des tarifs soit limitée à 6 % et que les usagers bénéficient réellement de la baisse de la TVA.

Le rapport de la Chambre régionale des comptes, publié en décembre 2018, précise que depuis 2012 les tarifs de la C.P.C.U. sont parmi les plus élevés en France. Je cite : « Le prix de vente moyen de la C.P.C.U. en 2015 était de 69 euros hors taxes par million de kWh. Il est supérieur de 14 % au prix de vente moyen des réseaux de chaleur en France. Il a augmenté de plus de 16 % depuis 2015. »

Première question : est-ce que la Ville de Paris fera appel de la décision du tribunal administratif ?

La C.P.C.U. est le premier réseau de chaleur en France. Il alimente en chaleur 220.000 foyers via un réseau de près de 500 kilomètres de canalisations ; 45 % de la chaleur fournie par la C.P.C.U. sont récupérés auprès de trois unités du SYCTOM qui valorisent les déchets ménagers d’Ile-de-France, mais cela ne représente que 20 % de la chaleur mobilisable ; 8 chaufferies produisent le reste de la chaleur.
En février 2019 puis en novembre 2019, nous demandions au Conseil de Paris si les intérêts des utilisateurs du réseau et de la Ville étaient réellement bien défendus. Nous voulions comprendre pourquoi 21 % des clients payent une facture annuelle supérieure au prix maximum autorisé en raison de leur faible consommation.

Pour le groupe Ecologiste, les deux projets de délibération présentés en Conseil de Paris ont entériné une hausse inacceptable des tarifs.

Récemment, un article de « Marianne » détaillait le scénario de la fin de concession de la C.P.C.U. avec la Ville. Tout l’enjeu pour la C.P.C.U. est d’imposer à la Ville de Paris que le remplacement de presque 64 kilomètres de ses tuyaux ne constitue pas un entretien simple mais bien une modernisation, avec à la clé un chèque de près de 457 millions d’euros que la Mairie devra payer en 2024.

Rappelons que la baisse de TVA aurait dû servir à l’investissement et non à augmenter les marges bénéficiaires d’Engie. Plus de la moitié des sources d’énergie utilisables par la C.P.C.U. pour produire la chaleur est renouvelable ou de récupération, mais en 2018 le charbon a représenté 14 % du « mix » énergétique de la C.P.C.U. et la combustion de déchets 44,5 %. Les énergies renouvelables ne représentent que 6,5 % de la production totale.

Le groupe écologiste demande au Conseil de Paris : où en est-on de la sortie du charbon à Saint-Ouen ? Le 100 % est-il atteignable à court terme ? Où en est la préparation du renouvellement de la D.S.P. ou pas en 2024 ?


Réponse par Mme Célia BLAUEL, adjointe à la transition écologique, climat, environnement, eau et assainissement


Je dois dire que je me réjouis de constater que la question de nos politiques énergétiques s’invite jusqu’à notre dernier Conseil de Paris, tant elle est centrale si on veut atteindre nos objectifs en matière de transformation écologique de la Ville. C’est évidemment un écho direct à l’objectif de neutralité carbone en 2050 que nous nous sommes collectivement fixé lors de l’adoption du Plan Climat. Et qui dit neutralité carbone, dit diminution par deux de nos consommations d’énergie et verdissement de notre « mix » pour atteindre le 100 % énergies renouvelables.
Dans cette perspective, le réseau de chaleur urbain parisien – je le rappelle, le septième le plus important en Europe et le premier en France – est clairement un atout considérable pour lequel nous avons à bâtir des politiques ambitieuses qui répondent au moins à trois enjeux, et Jérôme GLEIZES en a esquissé certains.

Le premier élément est le futur mode de gestion. Vous savez que la D.S.P. actuelle se terminera en 2024 et le travail sera mené au début de la prochaine mandature pour décider de l’avenir de ce service public.

Le deuxième élément est l’investissement et a fortiori l’évolution technologique du réseau. Là aussi, vous en avez parlé, et sur ce sujet les défis sont considérables. Je tempérerai tout de même votre propos en redisant ici ce que j’ai déjà dit dans un précédent Conseil de Paris. L’article de « Marianne » n’est pour moi en rien une référence dans ces réflexions. Je me réfère plutôt à tous les audits environnementaux et financiers, ainsi qu’aux discussions que nous avons pu avoir ensemble au sein de la commission de contrôle de la C.P.C.U. pour bâtir la stratégie à venir, tant l’article de « Marianne » est mal documenté sur ces éléments.

Enfin, il y a la question de l’évolution tarifaire pour maintenir ce réseau abordable et attractif pour les usagers, mais aussi soutenable pour réaliser l’entretien et les investissements.

Sur ce sujet plus particulier, je voudrais rappeler la situation. Le tarif a effectivement évolué. Il a évolué à la baisse d’abord, puisque nous avons atteint les 50 % d’énergies renouvelables dans le « mix » de la C.P.C.U., ce qui nous a permis d’opérer une baisse de la TVA sur la facture des Parisiens, en moyenne de 2 %. Toutefois, cette baisse a été aussi pondérée par deux autres facteurs en hausse : une hausse liée à l’augmentation du prix de la chaleur revendue par le SYCTOM et une autre liée aux investissements importants, car ceux-ci ont eu lieu pour réduire les pollutions de l’air et en faveur des énergies renouvelables.

A titre d’exemple, dès le début du mandat, nous avons supprimé tous les combustibles fuels dans la C.P.C.U.

Eh oui ! Nous sortirons, comme c’est prévu par le Plan Climat, du charbon au plus tard en 2024 et il est même probable que nous puissions le faire avant. C’était pour répondre à ce qui était votre deuxième question.

Par ailleurs, il y a ce jugement du tribunal administratif du 7 janvier dernier qui nous enjoint à fixer une nouvelle grille tarifaire. Le calendrier de travail du Conseil de Paris ne le permettant plus, ce sera sans aucun doute un des premiers votes du prochain Conseil de Paris. Je ne peux que souscrire au jugement sur le fond.

L’établissement de cette grille permettra de répondre tant au sujet du gel des tarifs qu’à la régulation du cadre global de son évolution.

Pour répondre à votre autre question, la Ville n’a pas prévu à ce stade de faire appel de cette décision.

Pour conclure, comme nous avons un historique des débats sur ce sujet, je souhaiterais inviter celles et ceux qui aborderont ce dossier, dans les semaines qui viennent ou après le mois de mars, à se garder des pensées simplistes. Le dossier est vraiment complexe. Il n’est aujourd’hui pas convenable de sérieusement défendre la nécessité d’investir et d’exploiter les potentiels du réseau de chaleur pour réussir la transition énergie, et en même temps d’éluder la question tarifaire qui nous priverait des moyens de le faire, et en même temps de ne pas adopter à
l’échelon national une fiscalité écologique sur les énergies fossiles. Le « en même temps » n’étant pour moi définitivement pas une ligne politique efficace pour réussir le pari de la transition écologique !

Je n’en doute pas donc. Le sujet de la C.P.C.U. occupera autant le futur Exécutif qu’il nous a occupés pendant ce mandat. C’est un sujet complexe, je l’ai dit, mais qui cache derrière une technicité certaine beaucoup d’enjeux politiques pour faire des choix, pour achever la construction de la ville durable pour laquelle je suis intimement convaincue que nous avons posé de forts jalons au cours de cette mandature.

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