Sécurité lors des manifestations
Partager

Monsieur le Préfet, je vous souhaite à mon tour la bienvenue à Paris, dans un contexte qui, je le sais, est difficile et complexe.

 

D’ailleurs, permettez-moi de revenir sur l’analyse que nous faisons de la situation. Parce que l’accélération du climat et l’explosion des inégalités sociales sont les deux symptômes d’un même modèle de développement qui ruine notre environnement et nos conditions du vivre ensemble.

 

Nous n’opposons pas les revendications pour plus de justice fiscale et sociale portées par le mouvement des Gilets jaunes à la revendication d’une justice climatique défendue dans les marches pour le climat. Au contraire, elles sont pour nous les deux faces d’un même symptôme, les mêmes aspirations à un modèle plus apaisé et plus égalitaire.

 

D’ailleurs, pour nous, il ne peut y avoir de justice climatique sans justice sociale et fiscale. Cela, pour une raison simple : quand les catastrophes climatiques se multiplient, qui sont les plus durement touchés ? D’abord, celles et ceux qui sont les plus précaires, les plus fragiles, d’abord, celles et ceux qui n’ont pas assez pour se préserver ou pour échapper à la fureur des conditions climatiques et environnementales.

 

Les Gilets jaunes ont imposé, dans le débat public, la remise en cause des politiques néolibérales mises en œuvre par des gouvernements successifs depuis des décennies. Fins de mois de plus en plus difficiles, précarisation toujours plus accrue du travail, injustice fiscale, logement cher, conditions de vie qui se détériorent, telle est la situation subie par la majorité de la population, et en particulier les femmes, d’ailleurs très nombreuses à se mobiliser.

 

C’est peu dire que la situation actuelle leur donne raison. Car si les conditions se dégradent pour une part importante de la population, en même temps, l’évasion fiscale n’a jamais été aussi importante. Pire, entre la suppression de l’I.S.F., la flat tax de 30 % pour les revenus du capital qui ne sont plus soumis à l’impôt progressif, ou encore la baisse de l’impôt sur les sociétés, on permet aux plus riches, qui devraient pourtant contribuer le plus aux efforts liés à la transition écologique de notre modèle, d’échapper aux contraintes fiscales.

 

Dans ces conditions, l’augmentation des taxes sur les carburants fut la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. On peut le comprendre. La justice climatique consiste à faire payer les gros pollueurs et/ou ceux qui ont le plus de ressources. Cet impératif n’est acceptable que s’il prend en compte celles et ceux ayant le plus de difficultés à s’adapter aux nouvelles règles du jeu.

 

Comment peut-on imaginer pénaliser des gens à qui on a vendu, pendant des décennies, le triptyque lotissement, voiture, fin des services publics de proximité, et qui n’ont plus d’autres choix que d’utiliser leur voiture personnelle ?

 

Comment peut-on imaginer faire payer des gens modestes quand, dans le même temps, on laisse des grandes multinationales échapper à l’impôt ?

 

Oui, il y a des violences, de la casse, des forces de l’ordre épuisées et des manifestants en colère. Oui, il est des comportements condamnables qui doivent être sanctionnés. Je veux ici d’ailleurs, au nom de mon groupe, apporter un soutien aux victimes de ces actes et aux agents de la Ville et à leur action.

 

Mais n’y a-t-il pas, au-delà de la réponse policière, une réponse politique à donner ? Le Gouvernement a lancé le Grand débat, sans que l’on sache très bien ce qui sortira de ces échanges nourris. La stratégie du pourrissement est détestable. Même si le Gouvernement parvient à réduire le mouvement des Gilets jaunes à des casseurs, il n’aura pas gagné.

 

Dans un contexte de raréfaction des ressources, de très forte instabilité climatique et environnementale, le silence face aux inégalités croissantes est tout simplement intenable à moyen terme. In fine, il ne peut aboutir qu’à la montée des violences et de la force, voire au chaos.

 

La question climatique nous oblige à une transformation radicale de notre organisation sociale avec, en premier lieu, d’autres modes de production, et surtout de redistribution des richesses.

 

La stratégie présidentielle, dont vous êtes le serviteur, consiste à orienter le débat vers la question des casseurs pour le détourner des questions de fond posées par les Gilets jaunes. La réponse est liberticide, là où elle devrait être émancipatrice.

 

Pour les prochaines semaines, Monsieur le Préfet, en tant qu’élu parisien, en tant que citoyen, je suis profondément inquiet de la tournure que prennent les choses. L’interdiction de manifester est contraire à la Déclaration universelle des droits humains, les arrestations préventives ou l’utilisation des produits marquants codés ne sont pas respectueuses de la dignité humaine.

 

Vous évoquez, dans votre intervention, une doctrine opérationnelle efficiente. Nous voulons en savoir plus, Monsieur le Préfet. Quelle sera votre politique les prochains samedis de mobilisation ? Quelles armes seront utilisées et avec quelles consignes ? Quels sont les moyens qui seront mis en œuvre ?

 

 

https://www.youtube.com/watch?v=bS8cS0MFTi0

 

 

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *