Entre JO et exposition universelle, organisons une vaste concertation citoyenne !
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Intervention de David Belliard relative à la candidature de Paris pour l’accueil des JO 2024

 

Madame la Maire,

Mes chers collègues,

Le débat de ce matin sur une éventuelle candidature parisienne pour l’organisation des jeux Olympiques et Paralympique de 2024 était attendu et, dans quelques minutes, nous allons voter. Pour un résultat qui ne fait guère de doutes…

Et pourtant, des doutes, Madame la Maire, il y en a ! Et cela malgré la presque unanimité de notre Conseil en faveur des  Jeux Olympiques, qui voit dans un même élan l’opposition de droite et une partie de notre majorité main dans la main pour soutenir ce projet. Comme si face au comité international olympique, notre assemblée était comme Rusalka, la sirène dans l’opéra de Dvorak, prête au sacrifice de la voix pour gagner les fruits bien illusoires de l’amour terrestre.

Et pourtant, même si comme vous, nous partageons l’amour du sport, de la voix, il en faut pour rappeler les doutes et les interrogations que suscite une telle candidature.

A commencer par le seul coût de la candidature, qui oscille entre 60 et 100 millions d’euros, soit les deux tiers de l’investissement de 150 millions d’euros du plan vélo – activité physique s’il en est ! – que nous allons discuter aujourd’hui. A l’heure où nous connaissons une grève dans les gymnases et piscines de notre ville, à l’heure où nous sommes confrontés à la vétusté de nos installations, à l’heure où nous investirons un petit 46 millions d’euros pour améliorer le sport à Paris en 2015, est-il vraiment sérieux de vouloir consacrer une telle somme pour soutenir une candidature dont la résultat est bien hypothétique ?

Et quand bien même, imaginons donc qu’après avoir dépensé ces quelques 100 millions d’euros, Paris soit choisie comme ville hôte des JO 2024. Pour quel coût ? Le rapport du mouvement sportif – le seul document d’ailleurs sur lequel s’appuie votre décision – nous dit que l’organisation de cet événement coûterait 4,5 milliards d’euros. Et pourtant, pas un expert, pas un économiste sérieux ne confirme ce chiffrage. La fourchette basse de l’investissement serait plutôt de 6 milliards d’euros. Au bas mot ! Nos voisins britanniques avaient eux aussi annoncé 5 milliards d’euros pour organiser les jeux de 2012… Pour finir sur une facture de 10 milliards !

Ce doublement du montant initialement prévu a une raison simple : la logique même des jeux olympiques contemporains et du comité international olympique, c’est l’inflation des dépenses et  le « toujours plus ». Pour gagner, Paris devra « faire plus » que Boston, plus que Hambourg, plus que Rome.

Et côté recettes, qu’en est-il ? On nous dit que les jeux olympiques seront une manne financière sans précédent, et profiteront à tous. A tous ? Ah non, pas aux commerçants éloignés des sites sportifs, puisque la consommation de l’afflux de spectateurs se concentre aux abords des sites olympiques, qui seront trustés par des enseignes mondiales avec qui le CIO aura préalablement contractées. On constate même une diminution du chiffre d’affaire pour les commerces habituels pendant les Jeux. Mais de cela, sans surprise, le rapport du mouvement sportif n’en fait pas mention. Alors les JO vont-ils profiter à l’Etat, qui va récupérer des impôts supplémentaires ? Encore raté ! Le CIO, comme de nombreux organisateurs d’événements sportifs internationaux, sera exempté d’impôt. Si Paris organise les JO en 2024, La France va se transformer en immense paradis fiscal pour un CIO qui génère des milliards d’euros de recettes !

Pour toutes ces raisons, vous conviendrez, Madame la Maire, mes chers collègues, qu’on peut légitimement interroger la balance coûts / bénéfices d’un tel événement. C’est aussi notre rôle en tant qu’élus en responsabilité de ne pas tomber dans le piège de l’amour aveugle du sport pour préserver un développement raisonné et durable de la capitale et de notre région. C’est aussi notre rôle de ne « pas faire le pas de trop », de celui qui mettrait en danger très gravement les comptes de notre collectivité.

Nous ne sommes pas contre les grands évènements sportifs a priori. Ainsi nous soutenons-nous l’accueil des Gay Games et de la coupe du monde de football féminin. Nous voulons que notre Ville puisse organiser des événements internationaux exemplaires, porteurs des valeurs de pédagogie, d’humanisme et d’échanges qui sont celles que nous défendons. Pourquoi d’ailleurs, Madame la Maire, ne pas nous tourner vers un événement comme l’exposition universelle par exemple, dont le modèle économique est autrement plus sobre et dont les valeurs plus adéquation avec le projet que nous défendons pour Paris et la région Île-de-France ? Vous nous dites que vous n’avez pas abandonné cette piste, mais à vouloir courir deux lièvres à la fois, on revient souvent bredouille.

Pour choisir entre ces deux événements, entre JO et exposition universelle, organisons une vaste concertation citoyenne ! Mais je laisserai ma collègue, Anne Souyris, compléter mon propos.

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