déposé par Joëlle Morel, Pascal Julien, Marie Atallah, David Belliard
et les élu.e.s du Groupe écologiste de Paris (GEP)
Considérant que sur les “55 millions d’hectares que compte le territoire français métropolitain (550 000 kilomètres carrés), un peu plus de 28 millions d’hectares sont aujourd’hui occupés par des activités agricoles” (Ministère de l’Agriculture) ;
Considérant qu’en 2008, 50% de l’espace occupé par la Région Ile-de-France était considéré comme “espace agricole” ;
Considérant que les cultures agricoles franciliennes sont très variées, notamment du fait de particularités géographiques, biogéochimiques et historiques (ex. grandes cultures sur les plateaux calcaires aux épaisses couches de limon dans le Vexin, la Brie laitière ou encore le Hurepoix maraîcher, etc.) ;
Considérant que, plus encore que le reste du territoire français, l’Ile-de-France souffre particulièrement du recul des terres agricoles face au phénomène d’urbanisation : on estimait en février 2019 que l’Ile-de-France perd en moyenne 2000 hectares de terres agricoles chaque année (Chambre d’Agriculture d’Ile-de-France) ;
Considérant aussi que la menace qui pèse sur la diversité des cultures et la survie des petites exploitations est liée à la perte de terres agricoles qui entraîne la constitution de parcelles plus grandes et détenues par un plus petit nombre de personnes (en Essonne et dans le Val d’Oise par exemple, les exploitations sont moins nombreuses mais 2.5 fois plus grandes qu’auparavant) ;
Considérant qu’aujourd’hui “les grandes cultures (blé, orge, colza, betterave) caractérisent le territoire de l’Île-de-France en grande couronne; elles couvrent plus de 90% des terres agricoles de la région et représentent l’activité principale de plus de deux tiers des exploitations franciliennes” (Terre de Liens);
Considérant que les “cultures spécialisées” telles que l’horticulture, l’arboriculture ou encore le maraîchage se retrouvent en difficulté, notamment du fait de l’urbanisation, la pression foncière, la transformation dans les choix de cultures, l’agrandissement et le regroupement des parcelles, les produits lointains acheminés via Rungis entre autres (pour alimenter Paris, le reste de la Région et le territoire métropolitain), pour exemple, le nombre d’exploitations maraîchères a ainsi diminué de 71% en petite couronne entre 1988 et 2000 ;
Considérant, toujours d’après l’association Terre de Liens que : “Pour les départements de la petite ceinture de Paris (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne), la disparition des exploitations a entraîné une diminution de la SAU totale utilisée (plus de 80% des exploitations ont disparu entre 1970 et 2000 et presque 70% de la SAU a été perdue entre 1970 et 2000), et non une augmentation de surface des exploitations voisines (la surface moyenne n’a été augmentée que de 50% dans ces départements alors qu’elle a été en moyenne multipliée par plus de 2 dans les autres départements). Lors du départ à la retraite des chefs d’exploitation, les terres sont donc en majorité démembrées pour faire l’objet d’utilisation non agricole (urbanisation, parcs, etc.)” ;
Considérant que plus les exploitations s’agrandissent, plus leur reprise par de jeunes agriculteurs ou des néo-paysans est difficile car la valeur des parcelles concernées augmente et les prix montent en conséquence ;
Considérant que l’agriculture biologique se développe considérablement en Ile-de-France, par exemple, d’après le GAB Ile-de-France, “les surfaces franciliennes en Agriculture Biologique ont progressé de 30,5% en 2018 (+ 4 626 ha). Ce sont plus de soixante-dix fermes qui se sont, pour l’instant, nouvellement engagées en AB en 2018. A la fin 2018, 19 797 ha sont cultivés en bio, soit près de 3,5% de la surface agricole utile francilienne et les fermes biologiques représentent 7,7% des exploitations agricoles franciliennes” ;
Considérant que la ville de Paris possède des terres agricoles en Ile-de-France mais également partout en France, par exemple, elle possède ou possédait dans le Val d’Oise, la Ferme d’Herblay, vaste domaine agricole de près de 400 hectares au début des années 2000, loué à bail à des maraîchers dont des parcelles ont régulièrement été cédées depuis, abîmées par des décennies d’épandages des eaux non traitées de l’agglomération parisienne (plaine de Pierrelaye) ;
Considérant que la Ville de Paris a vendu des fermes importantes comme celle des Muraux (126 hectares) où un circuit de F1 est en projet ;
Considérant que, d’après le dossier “Ceux qui possèdent la France” dans le Nouvel Observateur du 30 juin 2011, la Ville de Paris vend toutes sortes de bâtiments, appartements, terres, dont les recettes étaient alors estimées par la ville à 150 millions d’euros par an ;
Considérant une note de l’APUR, datant de novembre 2000 au sujet du patrimoine de la Ville de Paris qui recense par exemple :
- que la DASES possède des terres agricoles en Seine-et-Marne,
- que la DPE possède des fermes et des terrains agricoles, des zones d’irrigations intensives, des peupleraies, des pépinières, ou encore des réserves foncières à hauteur de 30.1 million de M²,
- que la DPJEV possède y compris sur des terrains ne se situant pas sur les limites géographiques de la Ville de Paris (ex. Rungis, Thiais, Fresnes), environ 40 hectares de terres dédiées à la production horticole,
- que la DVD possède 1.4 million de M² de terres, de réserves foncières,
soit, la conclusion que, d’après l’APUR, la Ville de Paris, par ses différentes directions possédait alors, dans la catégorie “fermes, pépinières, jardins”, en Ile-de-France 11 668 388 m² ;
Considérant la difficulté d’obtenir des données complètes et à jour des possessions agricoles de la Ville de Paris.
Aussi, sur proposition de Joëlle Morel, Pascal Julien, Marie Atallah, David Belliard et des élu.e.s du Groupe écologiste de Paris (GEP), le Conseil de Paris émet le vœu que :
- un inventaire complet des propriétés et terres agricoles qui appartiennent à la Ville de Paris en propre ou via des organismes publics ou parapublics dont elle fait partie soit établi ;
- cet inventaire fasse mention des spécificités géographiques, géologiques et biogéochimiques, de l’état des sols (ex. pollutions), des usages passés et actuels (ex. types de cultures) ainsi que du régime d’exploitation des sols (ex. fermage) ;
- qu’une cartographie de ces terres et propriétés soit établie à l’échelle nationale ;
- qu’un recensement des terres agricoles vendues par la Ville de Paris depuis 2001 soit annexé à cet inventaire et cette cartographie ;
- l’ensemble de ces documents soit présenté aux élu.e.s du Conseil de Paris en 3e commission avant le Conseil de Paris de février 2020.