L’apparition des services de mobilité en flotte libre – j’utilise à dessein ce terme de « flotte libre » plutôt que l’anglicisme de « free floating » – a sensiblement modifié le paysage parisien, comme cela a été le cas dans de nombreuses villes en France et dans le monde entier, tant ce mouvement est globalisé à l’échelle mondiale.
L’approche de la Ville de Paris a été et est toujours celle du dialogue ouvert et ferme à la fois pour accompagner l’arrivée de ces nouveaux services de mobilité, les encadrer et les réguler. Cela s’est concrétisé tout d’abord par la signature d’une charte de bonne conduite avec les opérateurs de vélos et de scooters en juin 2018, et par la signature dans les toutes prochaines semaines d’une charte avec les opérateurs de trottinettes, arrivés sur les trottoirs parisiens durant l’été dernier.
Pour autant, les perspectives de développement de ces services appellent notre vigilance. En effet, les utilisateurs de ces services – je pense aux utilisateurs de trottinettes – peuvent se montrer irrespectueux des autres usagers de l’espace public, au point d’obstruer le cheminement des piétons et notamment de rendre difficile le déplacement des personnes âgées, des enfants et des personnes à mobilité réduite. Par ailleurs, quelques utilisateurs, notamment les plus jeunes, ont des comportements dangereux qui mettent en péril leur sécurité, mais également celle des autres usagers de l’espace public.
Dès lors, il apparaît essentiel d’encadrer, de réguler l’activité de ces services. Or, pour cela, nous ne disposons pas de tous les leviers juridiques. Dans l’état actuel du droit, les engins de déplacement personnels n’ont pas de statut propre. Le cadre réglementaire ne détermine pas où ils peuvent circuler et ils peuvent être stationnés. C’est la raison pour laquelle nous demandons, depuis l’été dernier, au Gouvernement qu’une clarification réglementaire soit opérée au niveau national et que les collectivités puissent bénéficier des outils prescriptifs nécessaires.
Pour autant, et sans attendre le vote de la loi d’orientation des mobilités et de ses décrets d’application qui n’arriveront peut-être pas avant la fin de l’année, voire en début d’année prochaine, nous entendons agir et mettre en place rapidement des solutions de régulation. A défaut d’une licence que le droit ne nous permet pas d’instituer, l’installation d’une redevance permet donc d’instaurer un premier élément de régulation. Il ne sera plus possible de se lancer sans projet relativement solide sur le territoire parisien. Le produit de cette redevance nous permet également de financer les emplacements de stationnement. Il n’est pas question que ces services tirent profit de l’utilisation du domaine public parisien et laissent à la collectivité seule le soin de financer des solutions qui permettent de limiter les externalités négatives liées à leur activité. Avec mon collègue Emmanuel GREGOIRE, nous avons mis en place cette redevance qui est présentée aujourd’hui à notre assemblée.
Toutefois, ainsi qu’il est d’ailleurs demandé dans le vœu des élus du groupe Démocrates et Progressistes, nous ne pouvons pas flécher directement les recettes perçues sur des investissements. Nous pensons également qu’il est légitime d’avoir un écart entre la redevance qui est instaurée pour les vélos et celle pour les trottinettes, car nous souhaitons favoriser les mobilités actives. En effet, le vélo est un mode actif, ce qui n’est pas le cas des trottinettes électriques.
Nous devons aussi prendre en compte la question de la durée de vie des véhicules. Je voudrais dire à M. LAURET, qui évoque la question des mobilités propres et qui serait éventuellement freiné, il faut regarder également la question de la durée de vie des véhicules. Lorsque vous voyez qu’aux Etats-Unis, les trottinettes en libre-service ont des durées de vie de 28 jours, ce n’est pas quelque chose de durable. Il s’agit d’obsolescence accélérée et ce n’est pas propre. Nous devons donc tenir compte de cet objectif de durabilité dans les services qui sont proposés, de manière que l’on n’ait pas simplement la question de l’objet en tant que tel, certes partagé et électrique, mais également la façon dont il est conçu, dont il est utilisé et dont il sera ensuite réutilisé ou recyclé.
Le choix que nous faisons est aussi celui d’augmenter la redevance en fonction du nombre de véhicules, ce qui permettra de réguler le déploiement de l’activité des opérateurs et d’éviter des stratégies où un opérateur chercherait à inonder le marché et à noyer la concurrence. En l’occurrence, il n’y a pas ici d’autorégulation du marché. C’est la raison pour laquelle la collectivité parisienne prend les devants pour éviter ces stratégies, qui ont été parfois utilisées dans d’autres villes en Europe ou dans le monde, notamment dans les villes asiatiques, où l’on a vu les effets dévastateurs que cela pouvait engendrer. Ce n’est pas notre approche. Nous sommes bien dans la régulation et l’encadrement absolument nécessaires.
Je terminerai en disant que les opérateurs doivent comprendre qu’il ne suffit pas de proposer une mobilité électrique et partagée pour s’inscrire dans une logique de soutenabilité. La durée de vie des véhicules est un élément fondamental de la soutenabilité des services de mobilité en flotte libre.
Par ailleurs, nous régulons aussi par le fait que, depuis quelques semaines désormais, la DPSP verbalise et enlève les véhicules qui sont mal stationnés. Ainsi, pour la seule semaine dernière, 70 verbalisations ont été réalisées par les services de la DPSP.
Enfin, je terminerai par la question de la charte qui a été initiée, pour dire que celle-ci est retravaillée. Dans les plus brefs délais, elle sera adoptée avec les opérateurs de trottinettes.
Nous associerons les élus du Conseil de Paris à la réflexion sur ces questions. C’est ce que nous proposons dans le vœu de l’Exécutif, de manière que les élus du Conseil soient informés et concertés quant aux solutions de régulation de l’activité des opérateurs qui seront développées dans les prochaines semaines.
Christophe Najdovski, Adjoint à la Maire de Paris chargé de toutes les questions relatives aux transports, à la voirie, aux déplacements et à l’espace public
Communiqué : Redevance pour le free floating à Paris : une nouvelle victoire des écologistes