Intervention d’Anne Souyris et David Belliard relative au Plan locla d’urbanisme (PLU)
Madame la Maire, mes cher-es collègues,
La délibération proposant une modification du Plan local d’urbanisme qui nous est présentée aujourd’hui, je dois l’admettre, a posé un certain nombre de question aux élus et militants écologistes parisiens et suscité nombre d’inquiétudes, ce d’autant que déclarations et explications publiques de membres de l’exécutif en faveur d’une densification de principe se sont multipliées.
Ainsi avons nous décidé de travailler à un vœu de notre groupe demandant des clarifications et engagements de l’équipe municipale quant à la vision de notre ville qui présiderait à l’élaboration de ce PLU modifié.
En effet, le lancement de la procédure de modification du PLU est un moment très important. C’est notre vision de la capitale et, plus largement, de la Métropole, qui est en jeu. Par ce vœu, nous avons avancé nos propositions et développé notre vision d’une ville ouverte, accueillante, où il fait bon vivre et respirer. Nous avons voulu y rappeler un certain nombre de nos principes, en termes de densification, de végétalisation, de qualité de vie et aussi de concertation, qui sous-tendent notre approche et notre réflexion sur ces sujets. Car ce processus de modification n’est pas un simple exercice d’intégration d’une nouvelle donne législative, c’est aussi la traduction d’un débat politique, et la réalisation d’une certaine vision de la Ville et, plus largement, de la vie.
Bien sûr, nous nous réjouissons de voir que la protection de l’environnement constitue l’un des objectifs de la modification du PLU. Ce processus de modification permettra notamment de prendre en compte le Plan climat énergie, qui affirme la nécessaire réduction des émissions de gaz à effet de serre, le Schéma régional de cohérence écologique, qui a permis d’élaborer une trame verte et bleue à l’échelle de l’Île-de-France, le Plan biodiversité ou encore le Schéma directeur de la région Ile-de-France, qui prend en compte logement et protection de l’environnement.
Tous ces textes constituent des avancées sur le plan environnemental et pour la qualité de vie des Parisiennes et des Parisiens. Ils sont la traduction de combats que nous, écologistes, avons menés et nous resterons vigilants sur la manière dont ils seront traduits dans le futur Plan local d’urbanisme de la Ville.
De la même manière, nous sommes bien évidemment favorables aux évolutions concernant la logistique urbaine avec pour objectif la réduction de l’impact environnemental du transport de marchandises, ce qui implique d’organiser au mieux la livraison aux derniers kilomètres. Ces nouveaux modes d’organisation de la chaîne d’approvisionnement sont nécessaires pour répondre à la double logique d’une meilleure efficacité énergétique des transports de marchandises au sein de la Ville et de celle de la préservation et du développement d’une activité économique de proximité. Paris bénéficie d’une véritable richesse de commerces et d’activités qui irriguent ses quartiers et structurent leur vie économique et sociale. Nous partageons la volonté de soutenir et de développer ces activités.
Mais cette modification du PLU rappelle l’équation que nous devons résoudre entre d’une part la nécessité de proposer plus de logements de qualité accessibles aux plus grand nombre et, d’autre part, celle d’améliorer la qualité de vie et d’apaiser la ville, par la préservation et le développement de services publics de proximité, d’espaces de loisirs, d’équipements sportifs mais aussi d’espaces non bâtis et végétalisés qui constituent autant d’îlots de respiration.
Nous voulons que Paris prenne sa part dans la création de logements et nous l’avons rappelé pendant la campagne électorale. Cependant, nous ne devons pas oublier que notre ville est déjà extrêmement dense, avec 20 000 habitants / km², et même 33 000 dans le 10ème et 42 000 dans le 11ème arrondissement. C’est dire que la pression est déjà forte sur ces zones, et que nous souhaitons que le comblement de ce qu’il est convenu d’appeler les « dents creuses » soit tout à fait exceptionnel. Plus largement, nous ne voulons ni entrer dans une logique de densification à outrance ni construire des tours énergivores, solutions qui toutes les deux abîment le paysage parisien et vont à l’encontre de notre volonté d’améliorer la vie et la ville au quotidien.
Madame la Maire, mes cher-es collègues,
Comme l’a exprimé ma collègue Anne Souyris, nous avons conscience de la difficulté à résoudre l’équation entre logements et qualité de vie. Pour résoudre au mieux cette difficulté, nous voulons utiliser tous les leviers du « mix logement » qui sont à notre disposition :
– Le premier levier est celui de la création de nouveaux logements, qui doit être la priorité dans les nouvelles opérations d’aménagement, tout en orientant l’offre de logements vers celles et ceux qui en ont le plus besoin. Nous souhaitons en effet que soit rééquilibrée la construction de logements en faveur de logements dits très sociaux, qui aujourd’hui constituent seulement un quart de la production mais les trois quarts des demandes. D’ailleurs, ces logements très sociaux constituent seulement 1,6% du stock de logements existants. Pour mieux répondre aux besoins réels, nous voulons un rééquilibrage sur le principe du « moitié – moitié » : moitié pour du logement très social, moitié pour les autres types de logements sociaux. Nous aurons l’occasion d’y revenir lors de l’examen de la délibération concernant le lancement de la procédure de modification du Programme local de l’habitat.
– Le deuxième levier est la remise sur le marché des logements vacants, y compris en participant financièrement à leur réhabilitation.
– Nous souhaitons en outre accentuer la transformation de bureaux en logements et nous espérons que nous pourrons aller plus loin que l’objectif de 200 000 m² transformés au cours de la mandature. A ce titre, la proposition d’une taxe sur les friches commerciales est une excellente nouvelle, comme le sont aussi les propositions relatives à la réduction de places de parking obligatoires lors de la construction de logements. Cette réduction avait été demandée depuis des années par les écologistes car cette contrainte est superflue et ralentit les procédures de mutation.
Cet usage du « mix logement », dans un équilibre intelligent entre les différents leviers à notre disposition, est l’expression pour nous d’une ville où il fait bon vivre et qui prend sa part aux besoins en logements des habitants de la Métropole. C’est aussi pour nous le meilleur moyen de rééquilibrer notre ville. Aujourd’hui, les nouveaux logements sont construits d’abord dans l’Est de la capitale, où le foncier reste disponible et moins cher, tandis que l’Ouest concentre les activités de bureaux. Plus largement, à l’Ouest se concentrent les richesses, tandis que l’Est accueille les plus modestes de nos concitoyennes et de nos concitoyens. Et nous, écologistes, nous voulons une ville plus équilibrée entre l’Est et l’Ouest de la capitale. Ainsi, la suppression du Coefficient d’occupation des sols nous oblige à trouver un autre moyen de contraindre les promoteurs et les aménageurs à préférer le logement au bureau. De notre point de vue, le ratio emploi/logement proposé par le Schéma directeur d’Ile-de-France doit être intégré dans le PLU. En outre, la préemption dans le diffus, que nous demandons depuis des années et que nous nous réjouissons de voir apparaître comme une priorité par l’exécutif, doit se faire aussi dans les quartiers les plus riches de la capitale. Cette stratégie a de notre point de vue un double intérêt : celles de proposer dans ces quartiers une offre de logements accessibles, et enfin, grâce à la loi ALUR, saluée par les associations et les acteurs engagés contre le mal logement, de démultiplier l’effet de l’encadrement des loyers. Des logements sociaux dans tous les immeubles permettraient en effet de faire baisser le coût moyen des loyers, et donc de baisser la limite maximale des loyers autorisés dans la zone attenante.
Enfin, nous ne le répéterons jamais assez, nos travaux sur le Plan local d’urbanisme doivent intégrer la question métropolitaine et c’est pour cela que nous avons demandé à ce que cette question, notamment sur la cohérence de la trame bleue et verte, soit explicitement intégrée dans nos travaux via la sollicitation des collectivités de la première couronne.
Plus largement, la réflexion métropolitaine est essentielle à un véritable rééquilibrage au sein de l’agglomération parisienne entre logements et emplois, entre ménages privilégiés et familles en difficulté. Nous sommes conscients de l’impossibilité d’attendre le lancement de la Métropole pour modifier le PLU, ce qui nous conduirait à remettre en cause un certain nombre d’objectifs ambitieux que nous nous sommes pourtant fixés collectivement.
Enfin, dernier point sur lequel nous souhaitons un engagement fort, c’est que la concertation locale soit au cœur de cette modification, et par là même les conseils de quartier.
C’est cette consultation qui permettra en effet à ce processus de correspondre aux préoccupations des Parisiens, à leur vision de leur quartier et de Paris, ce qui est essentiel en termes de cohésion sociale.
Ainsi voterons nous la délibération concernant le lancement de la procédure du PLU, ainsi que le vœu présenté par l’exécutif, ce dernier reprenant une part substantielle de notre vœu. Toutefois, nous avons bien noté que cette délibération ne fait qu’ouvrir le processus de modification. Nous resterons actifs et attentifs tout au long de l’ensemble du processus avec pour objectif que le texte modifié puisse répondre au mieux à nos valeurs.