Courrier à la Maire de Paris : Garantir aux Parisien.ne.s l’accès à une alimentation à prix abordable
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Paris,
le
24 mars 2020,

 

Monsieur David Belliard
Président du Groupe Écologiste au Conseil de Paris

Madame Fatoumata Koné
Vice-présidente du Groupe Écologiste au Conseil de Paris

Monsieur Pascal Julien
Vice-président du Groupe Écologiste au Conseil de Paris

 

                                        Anne Hidalgo
Maire de Paris

 

Objet : Garantir aux Parisien.ne.s l’accès à une alimentation à prix abordable

 

Madame la Maire,

La terrible crise provoquée par la propagation du virus Covid-19 appelle à des mesures exceptionnelles de la part des pouvoirs publics. C’est pourquoi le premier ministre a signé cette nuit le décret n° 2020-293 prescrivant les mesures générales nécessaires pour y faire face, dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire. Parmi celles-ci, l’interdiction des marchés alimentaires doit être attentivement considérée.

Vous avez annoncé, par la voix de votre premier adjoint, la décision de ne pas demander de dérogation pour les marchés découverts parisiens, comme le décret vous y autorise pourtant. Cette décision, motivée par des soucis de prévention que nous comprenons bien, nous semble néanmoins risquée à plusieurs égards.

Tout d’abord, l’accès à une alimentation saine pour toutes et tous et à un prix raisonnable, doit être une priorité de l’action de notre municipalité. Or la limitation du nombre de points de distribution commence déjà à provoquer une hausse des prix des aliments dans les grandes surfaces, notamment des fruits et légumes frais. Laisser aux grandes chaînes de distribution alimentaires le quasi-monopole de l’approvisionnement serait vraiment un coup très dur porté aux habitant.e.s des quartiers populaires, si cette hausse des prix devait se confirmer.

D’autre part, la limitation des déplacements à 1km du lieu de domicile, instaurée par le même décret, restreint le nombre de points d’approvisionnement alimentaire accessibles à chacun.e : dans les quartiers à forte densité de population, des problèmes d’accessibilité vont vraisemblablement se poser.

Enfin, d’un point de vue strictement sanitaire, il ne nous semble pas judicieux d’interdire les lieux de distribution alimentaire découverts qui constituent des espaces où le virus a moins de chance de se transmettre – tant que les consignes de sécurité de base sont respectées – que dans les espaces confinés comme les supermarchés ou supérettes. Les conditions de distanciation physique sont d’ailleurs plus difficilement respectées dans les espaces clos, et donc limités.

 

C’est pourquoi nous tenons par la présente à vous formuler trois demandes.

 

En premier lieu, nous vous demandons de revenir sur votre décision de ne pas faire de demandes de dérogations afin de maintenir ouverts certains marchés découverts parisiens.

Tous les marchés ouverts et couverts se voient dans l’obligation de suspendre leurs distributions. Sur le site internet paris.fr, 81 marchés alimentaires (ouverts, couverts, de spécialités) sont recensés. Ce sont 81 situations particulières. Les élu.e.s de notre groupe ont vu comme vous les débordements qui ont pu avoir lieu la semaine dernière sur certains d’entre-eux, notamment les plus grands. Or, il est impératif que les gestes barrières et les mesures de précautions sanitaires soient respectés de manière drastique. Cependant, sur une grande majorité des marchés alimentaires, les normes sanitaires imposées par le gouvernement ont été respectées. C’est pourquoi, beaucoup de maires d’arrondissements ainsi que les délégataires protestent, à juste titre, contre l’interdiction pure et simple de tous les marchés alimentaires à Paris. Les écologistes parisiens vous demandent, Madame la Maire, de demander des dérogations afin d’autoriser, au cas par cas et en concertation avec les délégataires, les placiers de ces marchés et les maires d’arrondissements, la tenue des marchés alimentaires où aucun problème de distanciation physique et où l’exécution des gestes barrières ont été observés depuis le début du confinement ou au sein desquels les mesures de sécurité ont pu être mises en place ces derniers jours.

Des milliers de Parisien.ne.s s’approvisionnent sur les marchés alimentaires car les prix y sont bien souvent plus bas que dans les circuits de grande distribution. Le report de tous ces consommateurs dans les épiceries parisiennes représente un risque majeur pour leur santé ainsi que pour celle des employé.e.s de ces établissements.

 

Ensuite, dans la même logique de nécessité d’approvisionnement, nous vous demandons solennellement de permettre aux distributions des AMAP de se maintenir.

A Paris, les AMAP alimentent plus de 3 500 ménages en produits frais et locaux. Ici aussi, comme pour les marchés alimentaires, il y a autant d’AMAP que de cas particuliers. Mais il faut avoir à l’esprit le fait que ces petites structures associatives, composées de quelques cinquantaines de foyers, sont très agiles et donc en capacité de trouver des réponses adaptées aux contraintes qui sont les leurs.

Dans ce cadre, tous les retours des distributions qui ont eu lieu le week-end dernier sont extrêmement positifs. Toutes les associations ont tout fait et ont réussi à énormément limiter les contacts interpersonnels via différentes méthodes, comme la préparation des paniers en amont par le producteur et la mise en place de créneaux horaires imposés permettant le retrait des paniers à des heures précises selon un planning étalé sur un temps plus long que d’habitude.

Alors que le confinement a lieu depuis une semaine maintenant, le nombre de repas à assurer pour les foyers est plus important et un panier plein de légumes est indispensable aux familles pour subvenir à leurs besoins alimentaires. Par ailleurs, ce système dans lequel les ménages récupèrent leur panier et repartent directement minimise le temps passé à l’extérieur et plus encore dans les supermarchés.

Pour toutes ces raisons, interdire les distributions serait selon nous une erreur grave, tant en terme d’approvisionnement pour ces foyers, que dans le fait que cela participera à un report supplémentaire vers les supermarchés, ce qui pose un réel problème sanitaire en augmentant le nombre de personnes s’y alimentant et économique en renforçant leur monopole et donc une possible augmentation des prix.

 

Enfin, et ce afin de prévenir toute envolée des prix dans les grandes surfaces parisiennes, nous avons fait la demande au gouvernement d’opérer un contrôle des prix de vente des grandes enseignes, afin de les contraindre à maintenir des prix justes et abordables et sanctionner toute augmentation injustifiée des produits de première nécessité, notamment des fruits et légumes frais. La peur d’une explosion des prix et d’une pénurie alimentaire dans les rayons des supermarchés pourraient favoriser des comportements de consommation individualistes tels qu’observés dès le weekend-end des 13 au 15 mars (certains rayons de produits secs ont été dévalisés rapidement) et alimenter des tensions inutiles en cette période déjà anxiogène pour nos concitoyen.ne.s.

Madame la maire, l’alimentation et l’accès à des produits frais de qualité sont des enjeux centraux de santé publique. Nous devons collectivement tout faire pour garantir aux Parisiennes et aux Parisiens leur accès, voilà le sens des demandes que nous vous portons ce jour.

Nous vous prions de croire, Madame la Maire, en nos sentiments les meilleurs.

 

Monsieur David Belliard
Président du Groupe Écologiste au Conseil de Paris

Madame Fatoumata Koné
Vice-présidente du Groupe Écologiste au Conseil de Paris

Monsieur Pascal Julien
Vice-président du Groupe Écologiste au Conseil de Paris

 

 

Télécharger le courrier : Garantir aux Parisien_ne.s l’accès à une alimentation à prix abordable_24032020

 

 

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