Condition animale
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Intervention de Jacques Boutault relative à la condition animale en Ville

 

Chers collègues, bonjour et merci. Merci à Pénélope KOMITÈS d’avoir organisé cette mission « Animaux en ville », que nous avions demandée au groupe Ecologiste depuis un certain nombre d’années. Le travail effectué entre 2016 et 2018 est à souligner. Nous avons engrangé une victoire symbolique très forte, quoi qu’il advienne : c’est que, désormais, l’animal est un sujet politique. Il ne l’était pas avant 2015, avant que l’animal ne soit considéré comme autre chose qu’un bien meuble. Aujourd’hui, la loi le considère comme un être doué de sensibilité, ce qui signifie que nous devons avoir des devoirs à son égard.

La préoccupation pour la condition animale ne cesse de croître dans la population. Chacun prend conscience que l’animal a une autre fonction que de nous nourrir, nous divertir ou nous vêtir. L’animal a des raisons de vivre pour vivre selon les instincts et l’expression de sa propre espèce, et non pas pour être uniquement au service des êtres humains. C’est cela, la découverte que nous permettent les scientifiques, qui affirment maintenant que non seulement les animaux sont des êtres sensibles, mais que beaucoup d’entre eux ont une conscience, des rêves, des actions, des stratégies et des relations sociales entre eux, et aussi avec les hommes. Nous nous satisfaisons donc de cette mission « Animaux en ville ». Il me revient le rôle un peu ingrat d’en pointer les limites, les lacunes.

En effet, si nous sommes globalement satisfaits et que le groupe Ecologiste votera cette délibération, nous souhaitions pointer une certaine déception en ce qui concerne les animaux commerciaux, à savoir les animaux dans les cirques et les spectacles, et les animaleries.

En ce qui concerne les spectacles, nous avons d’abord vu avec intérêt le dialogue se nouer avec les circassiens. De nombreuses réunions ont été menées, qui nous font penser qu’il aurait été possible d’aller plus vite et d’aboutir, d’ici 2021, à la suppression de toutes formes d’animaux sauvages dans les cirques. A ce sujet, on doit saluer l’initiative de Joseph BOUGLIONE et du cirque Pinder qui ont supprimé les spectacles avec animaux, nous disant bien que cela était possible dans des délais très court. Il reste trois cirques, plus les cirques itinérants, qui, à Paris, présentent encore des spectacles avec animaux sauvages et, comme cela a été dit, renvoyant ainsi un bien mauvais message aux trafiquants qui braconnent les derniers lions, éléphants et autres fauves, en particulier en Afrique.

Nous pensons qu’il était possible d’aboutir beaucoup plus vite, mais il faut que la Ville compense les pertes des circassiens, et notamment les aide dans la reconversion de leurs spectacles. Nous aurions aimé aboutir plus en avant sur cette question.

Sur la question des animaux dans les animaleries, on pouvait aussi, je pense, aller beaucoup plus loin. Nous avons demandé qu’un label soit mis en place pour que les animaux qui sont vendus dans ces espaces ne soient issus que des refuges, puisque nous savons, aujourd’hui, qu’une grande majorité, en tout cas qu’une partie importante de ces animaux sont originaires de trafics. Les animaux sont particulièrement maltraités. D’ailleurs, il suffit de voir la taille des cages dans lesquelles ils sont détenus, en attendant que les clients viennent les acheter, souvent par compassion, par achat impulsif, et non pas pour des raisons plus rationnelles.

Enfin, je voudrais pointer les dernières lacunes qui nous paraissaient importantes. C’est la question des animaux commensaux, c’est-à-dire les animaux sauvages qui vivent à côté de nous, à savoir les rats et les pigeons. Concernant les pigeons, si nous nous satisfaisons de la conférence qui va être organisée par la Ville au début de 2019, avant le printemps, sur la question des pigeons, nous souhaiterions que les études qui ont été rédigées, notamment le rapport sur les pigeonniers, nous soient transmises, puisque la question des pigeonniers est essentielle pour réguler sans cruauté la population des pigeons ; et que l’étude des associations Espace aéro (?) nous soit également transmise dans des délais suffisamment importants, c’est-à-dire suite à cette séance du Conseil de Paris, pour que nous puissions anticiper et mieux travailler cette conférence de début 2019.

Enfin, puisque mes cinq minutes sont presque écoulées, je dirai un mot sur les rats. Nous regrettons que les rats n’aient pas été un sujet de la mission animale, mais soient renvoyés à des questions d’hygiène. Les rats sont des animaux qui ne sont plus des animaux nuisibles. Vous savez que le Code animal a supprimé la notion d' »animal nuisible » au profit d' »animal pouvant engendrer des dégâts ».

Je voudrais insister sur la question des rats car les rats sont un vrai sujet à Paris. On les considère encore trop souvent comme des animaux nuisibles et porteurs de maladies. Ce n’est plus tout à fait juste puisque d’une part, je l’ai dit, la notion d’animal nuisible à disparu du Code de l’environnement au profit d’animaux pouvant occasionner des dégâts et réduire la question des rats à la question de l’hygiène n’est pas juste. Les rats souffrent d’une très mauvaise image liée à l’histoire alors qu’aujourd’hui ils ne sont pas plus vecteurs de maladies que d’autres animaux commensaux. On porte un regard sur eux qui est souvent un regard de détestation avec un sentiment très pulsionnel de rejet de ces animaux, mais cela ne doit pas générer des politiques publiques d’éradication à leur égard, même si ce n’est pas le point de vue de la Ville, en tout cas d’éradication cruelle. Il faut parvenir à réguler la population des rats avec des méthodes non violentes, comme cela d’ailleurs a été fait avec les pigeonniers contraceptifs, sur lesquels nous aurons un sujet de débat au printemps 2019.

Je crois que la question des rats doit aussi être intégrée dans cette question. On l’a dit, les rats ne sont pas plus nombreux aujourd’hui à Paris qu’hier, ils sont seulement amenés à ressortir en surface dans la mesure où plusieurs phénomènes concourent à les faire plus souvent ressortir et Christophe NAJDOVSKI les a évoqués. Il en manque un qu’il n’a pas évoqué et qui est l’artificialisation des dernières parcelles libres et la densification urbanistique en cours. Aujourd’hui, les rats ne peuvent plus sortir de leurs galeries souterraines dans des espaces non imperméabilisés par le bitume dans des petits squares ou des petits délaissés comme cela était le cas avant. Ils ressortent donc dans les parcs et jardins où, cela a été dit, ils y trouvent de la nourriture en abondance, les déchets laissés par les pique-niqueurs.

Toute cette question doit être intégrée et c’est pour vous dire que la question est large. Elle intègre effectivement des questions urbanistiques dans la prise en compte de la régulation de ces populations qui doit cesser d’être une régulation cruelle et violente comme c’est le cas aujourd’hui, puisque vous savez qu’on leur donne des poisons qui les rendent hémophiles et qui les fait décéder, perdre vie très lentement et avec énormément de souffrances.

Pour terminer sur cette question, je dirai simplement que l’un des quatre grands axes de la mission « Animaux », de la délibération que l’on vient d’adopter précédemment, c’est changer le regard sur la faune sauvage. Ainsi, changer notre regard sur les rats est également essentiel pour progresser sur cette question.

Dernière remarque sur ces délibérations, deux dernières remarques si vous le permettez. Une, essentielle, sur laquelle nous n’avons pas insisté, qui est la possibilité désormais pour les personnes sans domicile fixe de pouvoir être accueillies dans les lieux d’hébergement avec leurs compagnons à quatre pattes. C’est très important en matière de sociabilisation. Aujourd’hui, les personnes qui ont un animal ne peuvent pas être accueillies dans ces lieux et dorment dehors, ce qui n’est pas digne. Il faut pouvoir les aider et ne pas les séparer de leurs compagnons. Vous savez que les liens entre un animal de rue et une personne de rue sont très puissants, très forts et les séparer est souvent de très mauvaise politique.

Enfin, en ce qui concerne la gouvernance, nous ne sommes qu’à moitié satisfaits. Nous aurions préféré que la Ville aille beaucoup plus loin, qu’un adjoint soit dédié à cette question avec une administration à son service. Nous avons obtenu une mission « Animal » permanente liée à la DEVE avec des élus et une administration, la DEVE qui traitera ces questions. Je pense que l’on pourrait à ce niveau encore progresser.

Mais je le dis, finalement, l’animal étant désormais une vraie question politique à Paris, c’est d’abord cela, la victoire que nous pouvons revendiquer toutes et tous et la raison pour laquelle nous voterons aussi, en tant qu’Ecologistes, cette délibération.

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