Charte Parisienne de Prévention des Expulsions locatives
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Intervention de Galla Bridier relative à la Charte Parisienne de Prévention des Expulsions locatives

 

Merci, Monsieur le Maire.

Mes chers collègues, que de chemin parcouru depuis la première fois où nous avons eu connaissance de cette charte.

Je vous avoue que nous avons eu un peu peur quand nous avons vu la première version, tant il manquait des éléments essentiels à nos yeux.

Pas une mention de la circulaire de 2012, ou seulement très fine dans l’introduction, pas de mention des ménages labellisés Dalo, un manque cruel de nombreux acteurs dans les engagements pris par les partenaires.

C’est peu de dire que ce texte n’était pas à la hauteur des enjeux que connaît Paris.

Car les enjeux sont très importants, en 2015, le nombre d’expulsions locatives a bondi de 24 % par rapport à 2014. Cela est révélateur de l’échec des politiques de prévention des expulsions menées jusqu’à maintenant.

De nombreux éléments viennent expliquer cette situation alarmante, la précarité et les difficultés à joindre les deux bouts de nombre de nos concitoyens, la hausse des loyers dans les parcs privés et sociaux, ou encore le manque de coordination entre les acteurs sur le sujet du logement.

Améliorer le contenu de cette charte qui date de 2001 était donc un impératif majeur. Nous avons fait de très nombreuses propositions de modification du document, quasiment toutes nos demandes ont été intégrées à la charte et nous en sommes très satisfaits.

Je veux remercier ici Dominique VERSINI et Ian BROSSAT, et à travers eux leurs cabinets, et bien sûr les services pour le travail qu’ils ont fait suite à nos discussions, et qui a permis de faire évoluer le texte extrêmement positivement, nous pouvons être fiers de ce travail collectif.

La période de grand froid, que nous vivons en ce moment, nous rappelle cruellement la réalité de la vie à la rue, et évidemment l’importance de cette charte. Je garde en tête comme une boussole cette phrase prononcée par l’Abbé Pierre : « Les hommes politiques ne connaissent la misère que par les statistiques. On ne pleure pas devant les chiffres. » Voilà ce que doit être notre cap : sortir des chiffres, des statistiques, des rapports, se forcer à voir la réalité, surtout quand elle est désagréable et dure à voir.

Aujourd’hui, la réalité, c’est que, même lors du froid comme nous le vivons en ce moment, des gens vivent et dorment encore dehors. Ces gens parfois vivent dehors car ils ont été expulsés. Alors, non, pas ces jours-ci, car nous sommes en pleine trêve hivernale, mais ils l’ont été avant. L’expulsion d’été sous le soleil crée le sans-abri de la trêve hivernale quand il gèle.

Comment survit-on dans la rue par un froid pareil ? Je me pose cette question tous les jours quand je sors de chez moi. Là est l’enjeu de cette charte : faire en sorte que nos concitoyens ne soient plus à la rue.

Mes chers collègues, il était temps que nous nous dotions enfin d’un outil efficace et rénové pour lutter contre ce fléau. Car c’est ce qu’est cette charte : un levier que chaque acteur devra maintenant actionner conformément aux engagements qu’il a pris. La bataille, quelque part, ne fait que commencer, mais surtout elle doit se poursuivre, une fois que nous sommes dotés d’armes pour éviter ces drames humains que sont les expulsions.

C’est ce que doit être cette charte : une arme contre les expulsions, pour que nous fassions de Paris une ville où il n’y aurait plus personne à la rue. Pour cela, elle devra toujours évoluer en intégrant de nouveaux partenaires. Je pense, par exemple, aux magistrats qui n’y sont pour l’instant pas associés. Elle devra aussi s’adapter, notamment en renforçant l’accompagnement juridique pour les plus fragiles.

Mais cette charte reste un levier parmi d’autres à notre disposition que nous devons actionner si nous voulons vraiment mener une politique offensive vis-à-vis du mal-logement. Nous devrons nous attaquer plus efficacement encore à la spéculation qui sévit à Paris et fait augmenter les prix des logements ou encore à la vacance des bureaux qu’il faut transformer encore plus en logements.

Enfin, je le dis calmement mais très clairement, il est inacceptable que les personnes reconnues DALO continuent d’être expulsées par dizaines. Vous le savez, je me suis plusieurs fois exprimée ici dans cette Assemblée, Paris est la ville qui expulse le plus de DALO en France.

Nous avons demandé, dans le cadre des discussions avec les cabinets des adjoints, que la Préfecture s’engage à transmettre les chiffres de ménages DALO expulsés. Nous ne sommes pas parvenus à ce que cela figure dans la présente charte. Dont acte. Je rappelle tout de même que l’expulsion des ménages DALO sans solution d’hébergement derrière est un manquement à la loi.

Je finis, parce que c’est tellement adapté, par une dernière citation de l’Abbé Pierre, dont le rapport de la Fondation sortira demain. Il disait aussi que : « Le pouvoir est aveugle. Les détresses les plus accablantes sont muettes. Comment faire se rejoindre ceux qui savent et ceux qui peuvent ? » La réponse, nous l’avons : nous savons et nous pouvons. Alors, mes chers collègues, faisons.

Je vous remercie.

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